Silence complice des élites : Quand dénoncer était une posture, se taire devient un privilège

Une cinquantaine de morts. Une soixantaine de maisons incendiées. Un carnage prévisible que l’État haïtien n’a pas empêché. Kenscoff saigne, et pourtant, ceux qui se présentaient hier comme les garants de la justice et de la démocratie sont étrangement silencieux.

Où sont passés les intellectuels, les avocats, les journalistes, les politiques qui, sous Michel Martelly et Jovenel Moïse, dénonçaient avec fracas chaque dérive ? Ceux qui prétendaient être prêts à défendre le peuple contre l’injustice, où sont-ils aujourd’hui alors que le pays plonge dans le chaos ? Pourquoi ne les entend-on plus ? Leur combat était-il sincère ou simplement opportuniste ?

Un État irresponsable qui avoue son impuissance

Lors d’une conférence de presse officielle, le Premier ministre Allix Didier Fils-Aimé a fait une déclaration surréaliste : selon lui, les services de renseignement de la Primature, du ministère de l’Intérieur et de la Police nationale savaient que l’attaque de Kenscoff se préparait. Pourtant, rien n’a été fait. Pourquoi cette attaque a-t-elle eu lieu alors que le pouvoir était informé ?

Le chef du CSPN, censé garantir la sécurité nationale, se contente de poser des questions comme s’il n’était pas lui-même le premier responsable. Faut-il comprendre qu’il n’a aucun contrôle sur les institutions qu’il dirige ? Son étonnement est un aveu d’échec, une confession d’impuissance.

L’étrange silence des élites et des défenseurs du peuple

Face à ce drame, une autre question se pose : où sont passés ceux qui se disaient les “vigies” de la démocratie ? Où sont les voix qui, sous Martelly et Jovenel Moïse, dénonçaient la moindre bavure ? Pourquoi aujourd’hui, alors que des dizaines de familles ont été anéanties à Kenscoff, ne les entendons-nous pas crier au scandale ?

Ont-ils été achetés par le système ? Ont-ils fait le choix du silence pour préserver leurs privilèges ? Ou bien leur combat n’a-t-il jamais été que de la poudre aux yeux, une simple posture politique dictée par des intérêts personnels ?

Cette omerta en dit long sur la nature de notre classe dirigeante. Beaucoup se sont drapés de vertu lorsqu’il était opportun de s’opposer, mais aujourd’hui, ils détournent le regard pendant que le pays brûle.

À qui profite le chaos ?

Pendant que Kenscoff pleure ses morts, que les familles sont en deuil et que les survivants errent sans toit, une réalité s’impose : le chaos profite toujours à quelqu’un. L’instabilité permet à certains de renforcer leur pouvoir, d’imposer leur loi dans l’ombre et de détourner l’attention des vrais enjeux.

Les gangs continuent de terroriser la population, l’État se déresponsabilise, et la population, de plus en plus désabusée, s’habitue à l’horreur. Ce climat de terreur n’est pas un accident : il sert des intérêts. Pendant que les citoyens meurent, d’autres en tirent profit.

Haïti condamnée à l’oubli ?

Le massacre de Kenscoff est une nouvelle pierre dans l’édifice de la tragédie haïtienne. Mais ce qui est encore plus alarmant, c’est l’absence de réactions des élites, de la société civile et des institutions censées protéger les citoyens.

Hier encore, ils s’indignaient à chaque injustice. Aujourd’hui, ils se taisent. Ce silence est une trahison. Une trahison du peuple, de la justice et de l’espoir d’un avenir meilleur.

Jusqu’à quand Haïti continuera-t-elle à s’enfoncer dans ce gouffre sans que personne ne réagisse ? Quand est-ce que la société haïtienne exigera enfin des comptes à ses dirigeants, à ses prétendus défenseurs et à tous ceux qui, par leur inaction, laissent le pays sombrer ?

Leave a Reply

Your email address will not be published. Required fields are marked *

You May Also Like

Séance de Travail Stratégique entre le Directoire de Mains Unies et la Diaspora

Ce dimanche 19 janvier 2025, le Directoire du parti politique Mains Unies a tenu une séance de travail en visioconférence avec la Coordination Mains Unies de la Diaspora. Cette rencontre stratégique, marquée par des échanges constructifs, visait à poser les bases d’un développement durable pour le parti.

Macron rassemble l’Europe face aux menaces russes

À la suite de l’approche agressive de l’ancien président Trump envers les conflits européens et le président russe Poutine, le président français Emmanuel Macron plaide pour un front européen uni. Macron devrait inciter Trump à continuer de soutenir la souveraineté de l’Ukraine, soulignant que la Russie représente une “menace existentielle” pour l’Occident.

Russie-États-Unis : Un véritable accord de paix, pas une solution rapide

Moscou sceptique quant à la volonté de Trump d’obtenir un cessez-le-feu rapide…

Tensions au sein de Mains Unies : Woodly Fleurjuste dénonce une manipulation et revendique le leadership

Suite à des accusations de manipulation, Woodly Fleurjuste revendique son statut de président du parti Mains Unies. Le parti traverse une période de turbulences internes, alors que des divergences sur le leadership et des communications contestées suscitent la confusion et fragilisent sa stabilité en amont des élections internes prévues pour mars 2025.

Haïti : La police dément les rumeurs de dissension et réaffirme son engagement contre les gangs

La Police Nationale d’Haïti (PNH) a démenti formellement les rumeurs de dissension avec la MSS et a réaffirmé son engagement dans la lutte contre les gangs armés.

Quand le faste diplomatique éclipse les urgences d’un peuple oublié

Le gouvernement d’Alix Didier Fils-Aimé a alloué une somme vertigineuse de 500 millions de gourdes pour accueillir le président colombien, Gustave Petro. Tandis que Jacmel se prépare à accueillir un chef d’État étranger, les routes menant à cette ville restent dans un état lamentable, notamment le tronçon via Morne Jacques. Cet investissement spectaculaire pose une question troublante : à quel prix ces efforts de façade sont-ils réalisés, alors que des problèmes urgents subsistent tout autour ?